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Dans les pas d’André Courrèges, l’homme du futur, Coqueline continue à se préoccuper de la terre et des humains. Par Eric Jansen
De l’extérieur, rien ne laisse deviner l’incroyable univers de Coqueline Courrèges. La rue est sans doute l’une des plus calmes de Neuilly-sur-Seine. Mais quand la porte s’ouvre, c’est le choc : le soleil inonde un vaste jardin au fond duquel se dresse un atelier d’artiste. Tous les matins, Coqueline rejoint cet élégant cube de verre où André Courrèges se consacra à la sculpture et à la peinture jusqu’à la fin de sa vie. Là, entourée de son équipe polyvalente, elle poursuit un rêve : concevoir la voiture électrique de demain. « Avec 200 kilomètres d’autonomie et les modules de batteries qui se rechargent en cinq minutes. » La mode ne l’a jamais intéressé car comme disait André « la mode se démode » mais le futur qui a été le moteur de la création d’André Courrèges est toujours au centre de ses préoccupations. En 1968, alors que Paris manquait d’essence, elle avait fabriqué, pour lui faire une surprise, une voiture, Bulle translucide équipée d’une batterie au plomb que le couturier accueillit avec enthousiasme au défilé de juillet 1968. Entre ces deux-là, la complicité était totale. Depuis leur rencontre chez Cristobal Balenciaga, ils partageaient une même vision du monde ou plus exactement le même désir de le changer. Si le maître espagnol leur avait tout appris du métier, ils souhaitaient faire une haute couture plus en phase avec leur époque. La maison sera créée en 1961 et rapidement leur modernité fera mouche.
La presse américaine surtout s’enthousiasme, Diana Vreeland en tête, puis la France suit. Malin et visionnaire, André Courrèges dessine des modèles qui deviennent des best-sellers, comme la fameuse robe trapèze, l’ensemble pantalon, les bottes plates, les collants seconde peau, la mini-jupe. Révolutionnaires au départ, ses créations sont adoptées par une génération de femmes qui y trouvent liberté de mouvement et style. Des icônes comme Jackie Kennedy et Marella Agnelli popularisent cette esthétique forte, épurée, optimiste. Une esthétique qui dépasse le cadre de la mode. Le couple est sportif et souhaite promouvoir plus largement une façon de vivre. « André pouvait rajeunir les femmes, mais il fallait qu’elles fassent aussi un bout du chemin vers lui. » Un département Courrèges Design imagine des objets pour cette nouvelle société en train de naître : sac de golf, planche de surf, téléphone à touches… Le progrès est alors lumineux, coloré, joyeux. « C’est vrai que nous étions très gais à l’époque », se souvient Coqueline. Dans les années 1970, les boutiques se multiplient, le premier parfum Empreinte puis Eau de Courrèges sont des best-sellers internationaux. La success story va se prolonger jusqu’aux années 1980, puis la maison sera vendue, rachetée, vendue à nouveau… Mais pas question pour Coqueline de regretter quoi que ce soit. Avec son franc-parler légendaire, elle avoue : « Le métier est fini, c’est maintenant aux mains des financiers. » Toutefois, elle n’a pas renoncé à vouloir changer les mentalités - « le futur aujourd’hui, c’est l’énergie » -, suivant en cela la seule devise qui a guidé sa vie et celle d’André Courrèges : « Oser ! »
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